« Reconstruire le tissu social de la petite enfance »


Forum-débat animé par Bernard Bel et Guy Poitevin

15 juin 2003 -- de 15H à 17H30

A l'occasion de la Fête de la petite enfance

Accueil Naissance
2bis rue de la Providence
Paris (13e)
Métro : Place d'Italie, Tolbiac, Corvisart. Bus 62, 67, 57


(La transcription de ce débat est en cours de réalisation. Le texte intégral sera affiché sur ce site.)

Le chemin de la petite enfance est à l'image du vécu des femmes et des hommes qui deviennent parents : multiple dans les choix qu'il implique, toujours perfectible au fil des expériences... Et pourtant, dans le monde moderne, il ressemble de plus en plus à une voie unique balisée par de nombreuses « prises en charge » qui déresponsabilisent les parents tributaires du savoir professionnel.

La mainmise du monde médical sur la grossesse et l'accouchement aboutit -- particulièrement en France -- à une concentration déshumanisante des moyens techniques. On assiste à la fermeture systématique des petites unités obstétricales au profit des « usines à bébés ». Les parents qui choisissent l'accouchement à domicile (comme la loi les y autorise), ou ceux qui militent pour l'ouverture de maisons de naissance, sont catalogués comme « passéistes » ou même « sectaires ».

La naissance, en France, est devenue une marchandise dont le principal argument de vente est un discours sécuritaire, dénué de fondement scientifique, qui repose sur une confusion entre risque médical et risque médico-légal. Rien de surprenant à ce que les statistiques périnatales, dans un pays où se pratique la surenchère médicale, soient parmi les plus mauvaises d'Europe : la France est victime du syndrome de « malnaissance »...

Les premières années de l'enfant font aussi l'objet de nombreuses prises en charges ponctuelles, au détriment de la continuité d'une véritable politique familiale. Ainsi, la grande majorité des jeunes mères abandonnent-elles l'allaitement maternel, faute de soutien, dans les jours ou les semaines qui suivent leur départ de la maternité. Pour ce qui est de résoudre les nombreux problèmes posés par la petite enfance, les parents en sont réduits à glâner des informations souvent peu fiables, obsolètes ou contradictoires, dans des magazines spécialisés dont la ligne éditoriale est en grande partie inféodée à leurs recettes publicitaires. Dès le début de la grossesse, ils subissent en guise d'information le discours infantilisant de nombreux « spécialistes » autoproclamés. Discours paternaliste dans lequel le compagnon et père-en-devenir est souvent relégué au second plan.

« Nous élevons nos enfants comme nous cultivons nos plantes : hors sol. » (Pierre Rabhi)

Pour toutes ces raisons, nous travaillons à la reconstruction d'un tissu social autour de la naissance et du parentage. Les citoyens, hommes et femmes, peuvent-ils accéder à l'information, exercer leur liberté de choix, et faire valoir leurs droits dans le contexte médico-légal d'aujourd'hui ?

Ces questions seront posées aux parents, professionnels et associations dans le cadre d'une « coopérative de savoirs » dont tous les acteurs, quel que soit leur statut, exprimeront leurs besoins et apporteront leurs expériences et points de vue. Quels sont les moyens de communication aujourd'hui ? Des exemples seront proposés, aussi bien dans le travail de « proximité » des associations que dans celui des « communautés virtuelles » de l'Internet.

La première étape consiste à permettre l'expression des besoins, l'échange des vécus, le soutien matériel et émotionnel des personnes en difficulté. Mais comment passer à la seconde étape : une véritable mobilisation sociale pour une réappropriation de la naissance et du parentage par leurs principaux acteurs -- parents et enfants ? La question sera posée à l'ensemble des participants au débat, en prenant si posssible comme cas d'école le 13e arrondissement de Paris.

La conviction des animateurs du débat est qu'une prise de conscience à grande échelle ne peut pas émerger d'un mouvement « alternatif » quelconque, et encore moins de revendications corporatistes. La recherche d'un consensus autour d'une plate-forme de revendications -- comme celle prochainement présentée par un collectif d'associations aux Etats Généraux de la Naissance, toute légitime qu'elle soit dans ce contexte -- tend à occulter la multiplicité des choix et des références culturelles. La « mise en perspective politique » des problèmes liés à la petite enfance repose plutôt sur les dynamiques de changement social qui en abordent déjà certains aspects : entre autres, le « tissu associatif », mais aussi l'Internet, les groupes informels en milieu urbain ou rural, etc.

Un exemple historique de problématisation est l'émergence d'un courant « altermondialiste » multiforme à partir de points de résistance : « malbouffe », opposition aux AMI/GATT/OMC, écologie, OGM, économie solidaire, commerce équitable, droits de l'Homme, etc. Les questions relatives à la petite enfance sont presque absentes du débat politique actuel, quand elles ne sont pas récupérées, de manière univoque et caricaturale, par des courants conservateurs...

Le débat du 15 juin a pour ambition d'être un exercice de « démocratie active » visant à mieux cerner les lignes de forces convergentes. Il s'agit d'atteindre une « masse critique » pour susciter un véritable changement de perspective dans tous les rouages du système social.


Bernard Bel <bel@lpl.univ-aix.fr>, ingénieur de recherche au CNRS, est administrateur du portail « Naissance » et responsable de la liste du même nom. Auteur de "Naissance d'une communauté virtuelle" (à paraître dans les Dossiers de l'Obstétrique), il est aussi le secrétaire de l'Alliance Francophone pour l'Accouchement Respecté (AFAR), récemment fondée.

Guy Poitevin <guy@giaspn01.vsnl.net.in>, docteur en sociologie, est le directeur du Centre de recherches coopératives en sciences sociales (CCRSS) de Pune (Inde). Le CCRSS est la branche « recherche » de Village Community Development Association, un mouvement d'animateurs sociaux qui travaille depuis deux décennies dans les communautés d'opprimés du Maharashtra. Guy Poitevin est l'auteur de nombreux ouvrages (voir bibliographie), parmi lesquels "Inde : le développement, une impasse?" et "Sortir de la sujétion - essai sur la désubordination des parias de l'Inde", tous deux parus chez l'Harmattan.

Bernard Bel et Guy Poitevin font partie des éditeurs de l'ouvrage "Communication Processes" (trois volumes à paraître chez Sage publications). Cet ouvrage est l'aboutissement de plusieurs séminaires internationaux qui ont rassemblé des animateurs sociaux, des artistes et des universitaires spécialistes de la sociologie de la communication, tous engagés dans divers courants de transformation sociale. Ils sont co-auteurs de l'essai "Rencontre avec la naissance en Inde rurale".

Accueil Naissance est un lieu associatif du 13e arrondissement de Paris ouvert aux parents et aux professionnels dans le but de tisser des liens autour de la naissance et du parentage.


Sites Internet et associations francophones pour une approche « citoyenne » de la naissance