Casey Makela
Source : <http://www.maxpages.com/gentlyborne/My_Unassisted_Homebirth_Part_1>
et <http://www.maxpages.com/gentlyborne/Unassisted_homebirth_Part_2> Texte intégral avec permission de l'auteure Casey Makela est directrice de l'école de sages-femmes traditionnelles du Michigan (Michigan School of Traditional Midwifery <http://michiganmidwifery.bizland.com>, mstm@i-star.com) et l'éditrice de la revue The Calling. Elle dirige une pratique d'accompagnement de la naissance à domicile, dans le nord du Michigan, où elle réside avec sa famille. |
On parle aujourd'hui d'accouchement non-assisté (ANA) plus que jamais on n'en a parlé. C'est un choix important dans l'éventail des pratiques de la naissance. Ceux qui ne sont pas familiarisés avec le concept d'accouchement sans assistance découvrent que ce n'est pas un phénomène "nouveau". C'est plutôt une idée qui fait son chemin toute seule à mesure que les femmes qui font ce choix pour elles-mêmes et leurs familles prennent aussi l'initiative d'en parler ou d'écrire leur témoignage.
Alors qu'il y a autant de raisons différentes de faire le choix d'un accouchement non-assisté que de familles qui font ce choix, quelques critères entrent toujours en ligne de compte dans ce choix : l'implication personnelle, la responsabilité devant autrui, et un profond besoin d'intimité familiale.
Même si cela pourra paraître surprenant à certains, je fais partie de ces femmes qui ont décidé d'accoucher à la maison sans personne pour m'accompagner. Bien que les raisons de mon choix, initialement, aient été influencées par l'impossibilité de recourir aux services d'une sage-femme ou de soins médicaux conformes à mes désirs, le résultat a été un éveil à un style d'accouchement plus libérateur et plus gratifiant (empowering) que toutes mes autres naissances. Mon ANA a fait émerger une conscience de mon identité profonde sans commune mesure avec celle de mes autres accouchements.
Ce n'est que ces quelques dernières années que je me suis sentie assez libérée pour me mettre en avant et parler de mon accouchement non-assisté. Jusqu'ici, je n'osais pas intervenir dans le débat en relatant ma propre expérience à cause de la controverse privée et publique qu'elle avait suscitée il y a douze ans.
Je remercie les pionnières intrépides telles que Laura Kaplan Shanley et autres qui n'ont pas hésité à faire connaître leur décision d'accoucher sans assistance en écrivant des livres et en créant des ressources pour celles qui en sont au processus de décision. Leurs prises de paroles et leur force de conviction m'ont donné le courage d'aller plus loin dans mon témoignage. J'ai attendu longtemps pour le faire; c'est un témoignage dont chaque mot a une très grande signification pour moi.
Cette naissance, celle de mon dernier enfant, a eu lieu il y a douze ans au Michigan, où je réside actuellement. Ça me semble être hier... Chaque détail est resté gravé dans ma mémoire. Heureusement, j'avais pris soin, aussi, de rédiger des notes détaillées avant l'accouchement (mon propre suivi prénatal) et immédiatement après, pour en préserver une trace vivante.
Ce qui a rendu cet accouchement si particulier, c'est qu'il a été le seul où je n'ai pas eu d'assistance. C'était aussi un accouchement avec complications, mais en définitive j'ai vécu cette naissance jusqu'au bout par moi-même, en faisant appel à mon instinct primal, sans aucune aide et sans les conseils ni les directives (coaching) d'une personne "soignante". Personne n'a suscité de confusion en moi par sa perspective sur ce que mon corps avait besoin de faire. Je suis plutôt devenue introspective et je me suis accordée avec ce que mon corps accomplissait.
En réalite, je n'avais pas planifié d'ANA à l'origine. J'avais pris contact avec une association de sages-femmes récemment fondée au Michigan -- juste quelques années d'existence. Encouragée par le fait que des sages-femmes non conventionnées (lay midwives) en étaient à l'origine, j'espérais qu'elles pourraient me mettre en relation avec une sage-femme dans mon secteur. Tout de même, je n'étais pas la seule sage-femme dans cette région? Mais si, malheureusement, il n'y avait aucune sage-femme en activité dans le nord du Michigan, du moins pas la partie orientale de l'état, et aucune ne se serait déplacée jusqu'ici pour accompagner mon accouchement.
Au début, je me suis sentie démoralisée. Mon seul autre choix était d'accoucher à l'hôpital militaire. Aucun médecin dans notre secteur (ni même à quelques heures de route) n'acceptait de nouvelles clientes. J'ai examiné attentivement ma situation. Au début, j'étais frustrée, puis effrayée. Puis je me suis dit : "Eh bien! J'ai une autre alternative, je peux le faire moi-même."
Mon mari était vraiment anxieux à la perspective d'accoucher sans assistance. Il était anxieux à propos de tous les "si", sans oublier que mes accouchements précédents avaient toujours été longs et douloureux; je ne m'en tire pas bien au niveau de la douleur. Je n'ai pas vraiment essayé de le convaincre; ce n'était pas vraiment nécessaire. Nous avons toujours su parler sans détour, et il éprouvait beaucoup de sympathie ne ce qui concerne le dilemne auquel nous étions confrontés au sujet de cette naissance à venir. La naissance de notre dernière enfant, notre Marion, s'était déroulée à la maison, avec de fabuleuses sages-femmes. Mais mon mari n'était pas avec moi pour la naissance de ce bébé, et en dépit de l'assistance de la sage-femme, je m'étais sentie très seule. Mes autres filles avaient assisté à la naissance de Marion, et je désirais leur présence cette fois encore. Mais nous savions que notre famille serait séparée si cette naissance se déroulait à l'hôpital militaire.
J'ai fait quelques appels de plus aux associations de sages-femmes de l'état et aux bureaux des médecins pour être certaine d'avoir soigneusement vérifié toutes les options, mais ma décision devenait de plus en plus claire. Si je voulais accoucher à la maison avec ma famille, je devrais le faire seule. Apparemment il n'y a vait pas de sage-femme dans les environs, à part moi.
Nous avons commencé à faire nos plans. Il y avait un obstacle important à franchir. La date probable de mon accouchement était le 30 juillet, mais mon mari devait partir pour la Nouvelle Angleterre le samedi 26 et revenir tard dans la soirée du lundi 28. Ça me mettait les nerfs à vif. Non seulement je n'aurais pas de médecin ni de sage-femme, mais selon ce que le sort déciderait pour moi il se pourrait que je doive aussi me débrouiller sans mon mari!
Finalement je me suis résignée à accepter ce qui se présenterait. Quoi qu'il arrive, on ferait avec au moment opportun. Peut-être même le bébé naîtrait avant ces dates.
A mesure que ma grossesse progressait, je réexaminais plusieurs concepts et principes de base sur l'accouchement avec mon mari, presque chaque soir. Je voulais qu'il soit informé sur tous les aspects d'une naissance normale, avec une perspective plus attentive. Nous étions souvent assis ensemble tard le soir, étudiant et explorant tous les "si". Nous avions aménagé une salle d'accouchement agréable et fonctionnelle, avec tout l'équipement, y compris une bouteille d'oxygène.
Durant le troisième trimestre, je me suis mise à consigner mes signes vitaux dans le but d'établir un rapport post-partum. Sincèrement, je me sentais bien! Cependant, je commençais à prendre considérablement du poids, et rapidement. J'en étais personnellement responsable, vues les libertés que je prenais avec mon régime alimentaire, et mon histoire d'amour avec le réfrigérateur! J'aurais pu mieux faire, mais mes envies allaient à l'encontre du bon sens et je me "fourrais la fourchette dans la bouche", pour ainsi dire. Je ne dirai pas quel était mon poids au début de cette grossesse... personne ne me croirait... Il me suffira de dire que j'avais encore la taille 12 quand Marion était née l'année précédente, et j'avoue que je pesais 102 kilos le jour de cette naissance.
Nous avions aussi engagé une femme nommée Raylynn pour prendre soin de mes quatre autres enfants le jour où le travail commencerait. Elle allait les garder occupés, les divertir et s'occuper de toutes les petites choses à faire. Elle était nerveuse à l'idée d'assister à un accouchement à la maison, mais accepta de faire le travail. Elle n'était pas une doula ni même une quelconque professionnelle de l'accouchement ou de la santé, juste une aide familiale pour que mon mari puisse être avec moi. Mais y serait-il, après tout ?
Lorsque mon mari est parti le samedi, mon coeur était résigné au fait qu'il ne serait probablement pas à la maison à temps pour la naissance. je ne pouvais ignorer mes contractions de Braxton-Hicks (pré-travail), et j'avais eu un important écoulement de mucus pendant tout le jour précédent. Mais j'ai gardé tout cela pour moi, il avait déjà bien assez de soucis en raison de cet engagement qu'il ne pouvait remettre à plus tard. Après son départ, tôt le matin, je me suis mise au lit avec un bon verre de vin et me suis laissée aller tout le reste de la journée. Mes filles étaient de merveilleuses mother helpers. Nous avons lu des histoires et fait des jeux ensemble. Pour nous amuser, nous n'avons mangé que des céréales en guise de souper (des trucs faciles à préparer avec du lait) et nous avons regardé des films jusqu'à l'heure du coucher.
Le jour suivant, mes intestins se sont relâchés et j'ai passé encore beaucoup de temps tranquillement allongée. J'ai pris un bain tiède et me suis mise à méditer en visualisant que mon travail ne commencerait pas tant que mon mari n'était pas rentré à la maison. Les filles et moi avons passé du temps au soleil à l'extérieur, parlant de la nouvelle petite soeur qui était sur le point de voir le jour. Ce serait certainement une autre fille... car nous en étions venus à accepter le fait que les garçons n'étaient pas notre spécialité!
Le vin et la méditation étaient devenus pour moi d'importants outils de relaxation. J'ai tendance à être très énergique et il m'en faut beaucoup pour me calmer. En fait, j'ai une tolérance très grande vis à vis des médicaments anti-douleur et de l'ansethésie. Il m'en faut beaucoup pour que ce soit efficace!
Dans la nuit de lundi, je ne pouvais plus nier que le travail était commencé. Je me suis couchée tôt pour me reposer le plus possible. Finalement, mon mari est rentré à la maison tard ce soir-là. J'ai pu me relaxer dans ses bras et ne plus m'en faire à propos de sa sécurité ou à la pensée de me retrouver seule.
Mardi matin, nous sommes restés tranquilles. Les contractions étaient régulières. Nous avons décider de regarder un film et je me suis allongée, mais peu après j'ai dû me rendre à l'évidence qu'il fallait que j'aille dans notre salle de travail parce que je n'étais plus en mesure de faire abstraction des douleurs, et je ne voulais pas que les filles s'inquiètent. On était au milieu de la matinée. Nous avons téléphoné à Raylynn, qui, dès son arrivée, a pris le relais pour s'occuper des enfants à ma place.
Tôt l'après-midi, mes filles les plus âgées ont commencé à monter régulièrement pour me demander si tout allait bien. Je leur disais que oui, et leur demandais de ne pas s'inquiéter de ce qu'elles pourraient entendre. Est-ce que les livres sur l'accouchement décrivent les contractions du travail comme "intenses", "urgentes", "puissantes" et "parfois submergeantes"? Exact. Elles font mal. C'est ma description et mon analyse. Ouf. Douleur. Point.
Lorsque ma poche des eaux s'est rompue, finalement, il m'est devenu impossible de trouver une position confortable. Je me reposais, m'asseyais sur la commode et essayais de m'allonger, mais aucun endroit n'était satisfaisant. Les contractions étaient vraiment douloureuses dans mon dos, le bas de mes jambes, et vraiment pas drôles. J'essayais très fort de travailler avec chacune d'elles mais ne pouvais pas toujours demeurer au sommet. Alors j'entrais dans la tempête et je vocalisais lorsque je ne pouvais tolérer la douleur plus longtemps. Cela m'aidait, mais ne réconfortait pas mon mari !
Lorsque la pression sur le bas de mon dos et sur mes intestins est devenue intolérable, j'ai su que c'était le moment de pousser un peu. J'ai commencé par des expirations forcées. Je ne voulais pas projeter le bébé à l'extérieur mais seulement faciliter sa sortie. Je me suis assise et j'ai essayé de la faire descendre. La douleur avait commencé à avoir raison de ma confiance. Une fois que la tête est devenue visible, cependant, je me suis sentie un peu plus confiante et sûre de moi-même. Mais il y avait quelque chose qui n'allait pas.
La conscience que quelque chose allait de travers s'est lentement imposée à moi en devenant de plus en plus claire dans mon esprit. J'ai réalisé qu'un danger imminent se manifestait, m'entourant et me recouvrant presque. A chaque poussée, la tête de mon bébé descendait un peu, puis remontait. Je ne pouvais le voir et ne pouvais comprendre précisément la sensation jusqu'à ce que mon mari me dise ce qui se passait, après plusieurs poussées. J'ai changé rapidement de position, pour m'accroupir et me balancer un peu, ce qui m'a aidé. La descente est devenue plus progressive, je devais travailler très fort et rester concentrée. "Ça fait mal." C'était une vérité permanente et récurrente que je ne pouvais fuir alors que je pouvais à peine la supporter.
Au bout d'un moment, j'ai senti la nécessité d'un changement de position et me suis allongée de nouveau. Après quelques poussées plus régulières, la tête du bébé s'est montrée, j'ai touché ses cheveux, tièdes, mouillés, collants. Je savais que c'était presque terminé, je me sentais soulagée. Mais ce n'était qu'un illusoire moment de réconfort.
Comme le temps passait (j'avais une montre que je pouvais consulter facilement), mon mari m'a avisée que la tête du bébé n'effectuait pas de rotation, pas du tout. Il avait essuyé la petite figure, mais m'a demandé si la teinte bleu foncé qu'elle avait était "une couleur normale pour la peau". J'ai réajusté ma position et tenté de pousser sans contraction. Alors j'ai senti une douleur de pression sourde mais distincte à ma symphyse pubienne. J'ai réalisé soudainement que la vie de mon enfant était en sérieux danger. Mon bébé était coincé solidement et je ne pouvais le déloger. Avec des gémissements plaintifs, j'ai demandé à mon mari de vérifier le cordon, qu'il a trouvé enroulé autour du cou du bébé. Je lui ai dit de le dérouler, ce qu'il a fait.
Il y a certains moments dans la vie où l'adversité vous dévisage, telle le bourreau qui s'apprête à vous pendre et vous demande de vous maîtriser tout en se moquant sarcastiquement de votre désarroi. En une fraction de seconde, j'ai ressenti une détresse paralysante devant une voie sans issue. Il n'y avait personne pour me dire quoi faire. Il n'y avait pas de réponse à la question: "Comment?" J'allais perdre mon enfant et être condamnée par la culpabilité. J'allais échouer à accomplir la chose pour laquelle mon corps était le mieux construit, en présence de mes filles et de mon mari.
Mon mari a brisé la transe paralysante dans laquelle je me trouvais en m'annonçant combien de temps s'était écoulé depuis la sortie de la tête. La réalité m'a frappée en plein visage, alors qu'une contraction débutait. Je me suis concentrée, avec toute ma puissance, et me suis commandée à moi-même d'accomplir la tâche impossible. C'était mon accouchement, mon bébé, mon corps, et j'allais permettre que cette chose arrive TOUT DE SUITE!
Je suis devenue instinctive. J'ai ouvert les jambes aussi largement que possible et câlé mes pieds dans le matelas. Ensuite, j'ai agrippé fermement la tête du lit. Tout en tirant vers moi, j'ai remonté mes fesses vers le ciel, arquant le dos, et tout en faisant une rotation des hanches, j'ai poussé avec toute la puissance qu'une femme peut canaliser en ces instants. J'ai pris une autre inspiration et maintenu le mouvement de rotation des hanches constamment en même temps que la poussée. Je n'allais certainement pas perdre cet enfant sans me battre. La douleur qui avait toujours envahie lors de mes accouchements précédents s'est atténuée alors que je perdais contenance et hurlais durant les poussées qui ont fait naître mon enfant. Finalement, j'ai littéralement senti le relâchement de la pression de son épaule sous mon os pubien, et mon enfant a glissé, enfin libéré. Le cordon avait fait deux tours autour de son cou, mon mari n'ayant pu en dérouler qu'un tour.
En sanglots, j'ai ramené mon bébé vers moi, baisant sa tête encore et encore. Mon mari nous a couverts rapidement et s'est agenouillé en partageant mes larmes, notre enfant protestant bruyamment après ce voyage tumultueux. J'étais submergée de soulagement et de gratitude parce que mon enfant chéri était maintenant en sécurité dans mes bras. Nos filles avaient été présentes tout au long de la naissance. De quoi j'ai dû avoir l'air avec mon gros derrière moulinant dans les airs!!!
Tout à coup, l'une d'elle a dit : "Dis, maman, ça ne serait pas des testicules ?"
Reprenant conscience de leur présence, j'ai essayé de comprendre : "Quoi ?"
De nouveau elle a demandé : "Papa, ce sont des testicules, pas vrai ? N'est-ce pas à ça qu'elles ressemblent ?"
Mon mari et moi nous sommes regardés, ébahis, comme notre nouvelle fille criait à pleins poumons. Cependant, reprenant ses esprits, mon mari s'est levé et a retiré la couverture pour voir ce que les filles avaient aperçu.
Son visage a blêmi quelques instants. Puis, s'exprimant de plus en plus fort et se parlant à lui-même, il s'est exclamé : "Si c'en est? Pour sûr que c'en est. Tu parles! Ce sont bien des testicules! Oh mon dieu! J'ai un FILS! UN FILS, J'AI UN FILS!!!"
Il s'est placé juste en face du bébé et lui a murmuré: "Tu es un garçon!" avec un reste d'incrédulité et d'amusement dans la voix. Puis il a relevé la tête, m'a regardée et dit : "Chérie, je reviens tout de suite !" Moi, toujours au bord de l'hystérie en raison de ce que je venais de vivre, j'ai fait oui de la tête.
Moins d'une minute s'est passée avant qu'il ne ressurgisse dans la chambre, avec, merveille des merveilles (qui se douterait de ce qui peut passer par la tête d'un homme?) un gant de baseball enfilé sur sa main encore maculée de résidus de la naissance. Il s'est approché du lit et de l'enfant avec la même déférence qu'un prêtre s'approchant de l'hôtel, s'est agenouillé juste en face du visage de son fils en disant : "Fils, voici un gant de base-ball." Des larmes coulaient le long de son visage comme il avait sa première conversation coeur à coeur avec son fils. "Je vais t'apprendre, et un jour nous jouerons ensemble au baseball."
Même si je détestais m'immiscer, au bout de quelques minutes j'ai rappelé à mon homme que non seulement l'accouchement n'était pas terminé, mais il devrait au moins envisager de couper le cordon avant d'échafauder des plans pour les Ligues Majeures. Chaque chose en son temps!
John James Glenn est né le 29 juillet 1986. Il pesait 4,3 kg. J'ai choisi pour lui les noms des hommes les plus importants à cette époque, de sorte qu'il a deux prénoms. Ça a été un bébé robuste et en santé, le fils de nos rêves, un enfant merveilleux, qui est maintenant devenu un distingué jeune homme au coeur d'or. (Sur la photo ci-dessous il tient "Mr. Pibb"!)
J'ai été critiquée à de nombreuses reprises au sujet de cet accouchement, tant par ma famille que mes amis, et même des sages-femmes. J'en suis arrivée à trouver plus facile de ne plus en parler parce que je ressentais ces critiques comme une violation. Mais maintenant, il est temps d'en parler parce que ça vaut la peine d'en parler. C'est et ça restera un bel accomplissement de vie. Je ne veux jamais l'oublier. Je voudrais le faire à nouveau. Cette expérience a fait de moi une meilleure mère, une meilleure sage-femme et une meilleure femme.
Pendant des années, de nombreuses personnes m'ont demandé si je pensais réellement que mon choix de vivre un accouchement non-assisté était un bon choix. Je ne peux jamais que répondre: "Bon pour qui?" Bon pour moi? Oui. Mes accouchements m'ont toujours fait vibrer de la sensation d'un accomplissement et remplie de force intérieure pendant les jours qui suivaient, et cet accouchement non-assisté a été le meilleur de tous. Bon pour ma famille? Ils ont tous dit oui un grand nombre de fois.
A-t-il été bon pour mon fils ? Bon, ses débuts ont été quelque peu difficiles et tumultueux, mais il a tout de suite été entouré et baigné de l'amour profond de sa famille. La seule chose qui ait de nouveau mis à l'épreuve l'endurance de ce garçon le jour de sa naissance a été lorsque son père trop anxieux et heureux lui a donné un bain après avoir coupé le cordon. Il était tellement excité qu'il n'a pas réalisé que son fils aurait peut-être moins crié si la tempréature de l'eau avait été plus élevée de quelques degrés! Mais à part ça tout était vraiment merveilleux.
Je pense que ça revient à ça pour moi: je vis mes idéaux. Je ne pourrais jamais être une sage-femme militant pour l'accouchement naturel/à domicile aujourd'hui si je n'avais pas fait ce que j'ai fait lorsque c'était mon tour d'accoucher.
Je fais l'expérience de choses en lesquelles je crois vraiment, vraiment. Enfanter n'a jamais été quelque chose de facile pour moi. Chaque fois j'ai eu très mal. Les techniques de relaxation que j'ai apprises il y a vingt ans, et que j'ai même enseignées avant de mettre au monde mes propres enfants, étaient pleines de fadaises. La douleur n'était pas contrôlable avec la relaxation, la concentration et la détente de la bouche. Ça faisait mal, un point c'est tout.
M'élever et vivre mon potentiel de femme accouchante m'a mise au défi de me transcender moi-même, d'être davantage que ce que je croyais être. J'ai appris de toutes mes expériences d'accouchement que les bébés ne se contentent pas toujours de glisser sereinement hors du corps de leurs mères. Pour certaines femmes, l'accouchement les mène à l'extrême limite de la raison, et elles ont à faire leur propre route, individuellement, chaque fois.
Sous-entendre que les femmes qui souffrent en accouchant manquent de courage ou de contrôle est tout simplement rabaisser leur individualité et leur sentiment d'accomplissement dans l'accouchement.
En tant que sage-femme, je ne peux compter le nombre de femmes qui se sont excusées a posteriori de ce qu'elles percevaient comme un manque de maîtrise durant le travail. Elles ont tant lu de généralités à l'eau de rose sur ce qu'est (ou devrait être) la naissance, et "comment s'y prendre de manière efficace", qu'elles sentent comme avoir "raté" l'événement lorsque la réalité se révèle être une histoire entièrement différente. C'est vraiment affligeant d'entendre de telles choses de la part de femmes ayant accouché. J'ai passé beaucoup de temps à rectifier des préjugés imprécis et à travailler avec les femmes pour qu'elles acceptent leur individualité. Malgré le temps passé à éduquer les femmes avant leur expérience de la naissance, les conceptions erronées sont encore difficiles à surmonter, particulièrement parce qu'elles sont diffusées à large échelle dans les livres et les magazines. Je crois que la solution est simple : d'avantage de jeunes femmes devraient être impliquées dans les accouchements de leurs mères, soeurs et tantes. Les femmes ont besoin d'éducation primaire !
Je trouve que j'ai eu de la chance de passer par ces expériences extrêmes de naissance et tout ce qu'il m'a fallu endurer pour mettre au monde mes enfants. Mes naissances n'étaient jamais des images de perfection et je ne me suis pas complue dans l'angélisme. Pour ça, je n'aime vraiment pas cette douleur!!! Mais j'en ai tiré un avantage considérable. Ces expériences m'ont donné l'outil le plus efficace en tant que sage-femme: l'empathie.
Au cours de mes années de pratique en tant que sage-femme, j'ai accompagné des naissances avec des femmes qui avaient vraiment besoin de se secouer et se balancer pour faire sortir leurs bébés, et je ne cesse de les encourager à s'abandonner à l'instant présent et faire tout ce qui leur vient naturellement. Pour elles, c'est une libération du vécu de la naissance car elles ne se sentent pas tenues de se conformer à un quelconque idéal préfabriqué. Nous ne pouvons pas toutes être des beautés sur le lit de la naissance en train de gémir "doucement, avec des tonalités graves" jusqu'au moment où, "oups, le bébé vient de sortir". La naissance est une expérience individuelle et une expression de soi. Les sages-femmes et autres accompagnateurs devraient l'encourager de cette manière.
Je refuse de laisser Hollywood ou les interprétations/interventions masculines faire de mon lit un endroit dangereux au moment d'accoucher. Et je n'aurais jamais pu faire la queue pour le remède miracle d'aujourd'hui, la toute-puissante péridurale. Je refuse de me laisser intimider par l'expérience de l'accouchement "moderne", où les femmes peuvent accoucher avec le minimum de dérangement pour elles-mêmes, et le minimum d'inconvénients pour le personnel des institutions. J'ai toujours considéré l'intervention non nécessaire et faussement représentée comme un boniment de vente attristant et honteux. Mais ce sont mes choix de manière de faire, et j'ai toujours été fière de mes choix.
Je sais que l'enfantement est la plus sublime des conquêtes d'autonomie (empowerment). Quelque chose d'unique pour moi en tant que femme. Il a comblé mon besoin de sacralisation. Je suis trop heureuse de m'être donnée la chance de l'accomplir sans laisser personne me convaincre d'en faire moins!
J'ai écrit ceci parce que c'est important pour mes filles de se souvenir, et pour mon fils d'apprendre; c'est un moment estimable de notre histoire familiale et de leur héritage personnel. Peut-être cela aidera-t-il mes enfants à mieux se comprendre eux-mêmes plus tard.
J'ai aussi écrit ceci pour apporter mon histoire à la table de discussion sur les options d'accouchement. Les familles qui se prononcent pour un accouchement non-assisté méritent le respect.
Traduit de l'anglais par Marypascal Beauregard |
Sites Internet et associations francophones pour une approche
« citoyenne » de la naissance
<http://naissance.ws>